Loi Genre modifiée: élargissement des critères de protection

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Depuis le 19 janvier 2023, le critère protégé du « sexe » dans la loi Genre combattant la discrimination entre les femmes et les hommes, a été remplacé par onze critères protégés dont celui des « responsabilités familiales ». De nouveaux droits ont également vu le jour dans le cadre de certains congés pour motif et la compétence de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a été élargie.


La loi  genre transpose la directive européenne 2019/1158 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants en droit belge . Selon l’ancienne réglementation, la loi Genre ne protégeait le travailleur que sur la base du critère protégé du « sexe ». Cette notion ne permettait pas de déterminer facilement s’il était question de discrimination, raison pour laquelle elle a été remplacée par onze critères dans la nouvelle réglementation. La modification de la loi Genre vise également à étendre les situations où les travailleurs seront protégés contre une discrimination.

1. Nouveaux critères protégés

La loi Genre ne prévoit plus le seul critère « sexe » comme critère de discrimination, mais l’étend à d’autres critères en établissant une liste composée de critères protégés sur base desquels une discrimination est interdite:

  • le sexe ;
  • la grossesse ;
  • la procréation médicalement assistée ;
  • l’accouchement ;
  • l’allaitement ;
  • la maternité ;
  • les responsabilités familiales ;
  • l’identité de genre ;
  • l’expression de genre ;
  • les caractéristiques sexuelles et le changement de sexe.

Tout renvoi au mot « sexe » est donc remplacé par « critère protégé ».

La loi genre introduit la notion de « responsabilités familiales » comme critère de discrimination. La notion de « responsabilités familiales » doit être comprise comme la situation dans laquelle se trouvent toutes les personnes ayant des responsabilités à l’égard des enfants à charge ou d’enfants domiciliés ou qui ont des proches qui ont besoin d’une forme d’assistance ou de soin de type social, familial ou émotionnel.

Un travailleur peut prendre certains types de congés (voir point 2 ci-dessous) à ces fins et doit être protégé contre tout traitement défavorable en raison de ces soins ou de cette aide.

2. Situations où le travailleur est protégé

2.1 Congé pour motif

Les types de congés que le travailleur peut demander tout en étant protégé par la nouvelle réglementation, sont les suivants:

2.2 Demande de travail flexible

Le travailleur ne peut pas non plus subir de traitements défavorables liés aux responsabilités familiales (au sens de la loi Genre) lorsqu’il fait une demande de travail plus flexible au sens de la convention collective de travail n° 162.

En cas de non-respect de ce droit que prévoit la convention collective de travail n° 162, l’indemnité de protection éventuellement perçue en application de cette convention collective est cumulable avec l’indemnité forfaitaire due en cas de discrimination dans le cadre de la loi Genre. Elle est également cumulable avec d’autres indemnités dans le cadre de la rupture du contrat de travail sauf si une loi prévoit  expressément l’interdiction de cumul.

Enfin, nous précisons qu’un travailleur ayant adressé une demande de travail plus flexible conformément à la convention collective de travail n° 162 sera également protégé contre le licenciement. Cependant, cette protection se situe en dehors de la loi Genre.

Voy. également notre article à ce propos, au point 10.

3. Nouveaux droits explicites

La loi genre  reconnaît désormais explicitement certains droits dans le chef des travailleurs quand ils prennent certains congés:

  • dans le cadre d’un congé de maternité, d’un congé de naissance, d’un congé d’adoption ou d’un autre congé dans le cadre de ses responsabilités familiales, le travailleur a ainsi le droit de:

    • retrouver la même fonction à l’issue d’un de ces congés. S’il n’est pas possible pour l’employeur de proposer la même fonction, le travailleur doit avoir droit à une fonction équivalente ou similaire;
    • bénéficier de tous les droits acquis ou en cours d’acquisition durant la prise d’un de ces congés
  • dans le cadre de responsabilités familiales, le travailleur a également le droit de bénéficier de toute amélioration ou avantage octroyé au sein de l’entreprise durant son absence et auxquels le travailleur aurait eu droit durant son absence.

4. Indemnisation

Les travailleurs victimes d’une infraction à ces droits peuvent réclamer une indemnité forfaitaire de six mois de rémunération brute. Celle-ci peut être cumulée avec les indemnités de protection versées à la suite de la rupture d’une relation de travail sauf cas contraire mentionné dans la loi.

Pour rappel, il est également possible pour le travailleur victime d’une infraction d’opter pour une indemnisation du dommage réellement subi en lieu et place de l’indemnisation forfaire ci-dessus. Par contre, l’étendue du dommage réellement subi devra être prouvée par la victime, ce qui n’est pas le cas pour l’indemnisation forfaitaire.

5. L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes: nouvelle compétence

Puisque les critères protégés contre la discrimination ne sont plus assimilés au seul « sexe », la compétence de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a également dû être modifiée. Auparavant, l’intervention de l'Institut était conditionnée par l’accord d’une victime identifiée et aux cas où l’intervention se faisait au nom de celle-ci.

La nouvelle réglementation permet dorénavant aussi que l’Institut agisse en justice en son nom propre lorsqu’un cas de discrimination se présente, c’est-à-dire sans le consentement de la victime identifiée.

6. Sanctions pénales

Nous vous rappelons que si l’employeur ou quiconque dans la relation de travail commet une discrimination à l'égard d’une personne, il sera puni d’une peine d’emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de 400 EUR à 8.000 EUR (centimes additionnels compris) ou l’une de ces peines seulement.

Important : il doit s’agir d’une discrimination intentionnelle de la part du contrevenant.  La victime doit pouvoir invoquer des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur un des critères.

7. Entrée en vigueur

Cette loi a été publiée au Moniteur belge le 9 janvier 2023 et est entrée en vigueur le 19 janvier 2023.

 

Source : loi du 15 novembre 2022 portant modification de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, et la loi du 16 décembre 2002 portant création de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, M.B. 9 janvier 2023.