Trop chaud au travail : aspects dont l’employeur doit tenir compte


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A la suite des températures tropicales dont nous avons pu bénéficier ces dernières semaines et qui, à en croire la météo, n’appartiennent pas encore au passé, le moment nous paraît opportun de rappeler les règles à respecter par l’employeur quand il met ses travailleurs au travail par de telles températures.

Comme nous l’avions signalé dans notre article du 6 juillet 2012, ces règles ont été remplacées depuis le 1er juillet 2012 par l’application de nouvelles dispositions relatives aux ambiances thermiques lors de l’occupation de travailleurs. Les nouvelles règles remplacent les anciennes dispositions du RGPT dans ce domaine.

Qu’est-ce que ces règles nous enseignent ?

Analyse des risques à effectuer par l’employeur.

L’employeur doit effectuer une analyse des risques des ambiances thermiques présentes sur le lieu de travail en tenant compte des éléments suivants :

  • la température de l'air ;
  • l'humidité relative de l'air ;
  • la vitesse de l’air ;
  • le rayonnement thermique dû au soleil ou aux conditions technologiques ;
  • la charge physique de travail ;
  • les méthodes de travail et les équipements de travail utilisés ;
  • les caractéristiques des vêtements de travail et des équipements de protection individuelle ;
  • la combinaison de l'ensemble de ces facteurs.

L’employeur évalue les ambiances thermiques et si nécessaire, les mesure conformément aux méthodes de mesurage et de calcul déterminées après avis du conseiller en prévention-médecin du travail ou du conseiller en prévention hygiène du travail et après accord du comité pour la prévention et la protection au travail ou, à défaut de celui-ci, de la délégation syndicale ou, à défaut de celle-ci, des travailleurs eux-mêmes.

Ensuite, l’employeur détermine sur la base de l’analyse des risques les mesures de prévention adéquates.

A partir de quelles températures fait-il trop chaud pour travailler ?

Le fait qu’il fasse trop chaud pour travailler ne dépend pas seulement de la température mais est également déterminé par l’humidité de l’air, la vitesse de l’air et le rayonnement thermique. Tous ces éléments doivent être mesurés au moyen d’un « thermomètre-globe mouillé » qui exprime la chaleur présente sous forme de « Wet Bulb Globe Temperature » (WBGT), une température qui sera toujours inférieure de quelques degrés par rapport à la température exprimée en degrés Celcius.

Ensuite, les valeurs de la chaleur constatées doivent être comparées aux valeurs légales exprimées en WBGT qui ne peuvent être dépassées en fonction du travail à exécuter.

Les valeurs à ne pas dépasser en fonction du travail à effectuer, sont les suivantes :

 

Travail léger ou très léger 29
Travail moyen 26
Travail lourd 22
Travail très lourd 18

 

Mesures à prendre quand il fait trop chaud pour travailler

Lorsque les valeurs WBGT sont susceptibles de  dépasser les valeurs fixées, l’employeur doit prendre les mesures techniques et organisationnelles afin de prévenir ou de limiter l’exposition à la chaleur et les risques qui en découlent.

Ces meures peuvent être les suivantes :

  • des mesures techniques telles que par exemple l’aménagement d’une ventilation artificielle, la captation et l’évacuation de vapeurs ou de gaz chauds et humides, la pose de cloisons réfléchissantes, etc. ;
  • la diminution de la charge de travail physique par l’utilisation d’équipements et de méthodes de travail adaptés ;
  • la limitation de la durée et de l’intensité de l’exposition ;
  • l’adaptation des horaires de travail ou de l’organisation du travail ;
  • la fourniture de vêtements de travail de protection ;
  • la mise à disposition gratuite de boissons rafraîchissantes ;
  •  …

Dans certains cas, l’AR précise les mesures que l’employeur est obligé de prendre. Lorsque la transgression des valeurs d’action est due aux conditions météorologiques - comme ce fut  le cas ces dernières semaines et cela le sera encore dans les semaines à venir - l’employeur est obligé de prendre les mesures suivantes :

  • Si le dépassement des valeurs se maintient, dans les 48 heures suivant la constatation du dépassement, installer un dispositif d’aération artificielle ;
  • Si les dépassements perdurent au-delà de ce délai de 48 heures, instaurer un régime de présence limitée et de temps de repos ;
  • Assurer la distribution de boissons rafraîchissantes, sans frais pour les travailleurs, après avis du conseiller en prévention-médecin du travail ;
  • De plus, protéger les travailleurs contre les rayonnements solaires : cela peut être réalisé par un système de protection matérielle ou par l’adaptation de l’organisation du travail. Si les travailleurs sont directement exposés aux rayonnements solaires, ils doivent pouvoir disposer de moyens de protection personnels ou collectifs (par exemple : crème solaire, chapeau, etc.).

A moins que l’employeur puisse faire valoir qu’il applique certaines normes ISO qui imposent le respect de règles en matière de présence limitée et temps de repos quand il fait trop chaud pour travailler, l’employeur est tenu de demander préalablement à l’instauration d’un régime de présence limitée et de temps de repos, l’avis du conseiller en prévention-médecin du travail et d’obtenir l’accord du comité pour la prévention et la protection au travail et, à défaut de celui-ci, de la délégation syndicale. A défaut d’accord, il sera vérifié si la commission paritaire à laquelle l’employeur ressortit n’a pas fixé des règles dans le cadre d’une CCT rendue obligatoire. A défaut de telles règles, les temps de repos suivants doivent être observés :

Alternance au travail                                                    Valeurs WBGT

  Travail léger Travail moyen Travail lourd Travail très lourd
45 min. de trav. - 15 min. de repos 29,5 27 23 19
30 min. de trav. - 30 min. de repos 30 28 24,5 21

Enfin, les travailleurs exposés à ces chaleurs excessives devront également recevoir les informations et la formation nécessaires en rapport avec les résultats de l’analyse des risques, les valeurs d’action, etc.

Rôle du conseiller en prévention-médecin du travail

Le conseiller en  prévention-médecin du travail détermine la catégorie (léger/semi-lourd/lourd/très lourd) d’un travail. En outre, il conseille l’employeur au sujet des mesures à prendre en faveur des travailleurs appartenant à des groupes à risque particulièrement sensibles tels que les jeunes travailleurs et les travailleuses enceintes. Il conseille également l’employeur en matière de distribution de boissons rafraîchissantes.

Le travailleur peut-il s’absenter du travail quand il fait (trop) chaud ?

Le travailleur ne peut pas décider simplement de s’absenter de son travail. Même pendant les périodes de grandes chaleurs, il doit continuer à exécuter le travail convenu. Ce n’est qu’en cas d’instauration d’un régime de présence réduite par l’employeur que le travailleur ne devra pas se présenter à son poste de travail.

L’employeur peut-il instaurer un régime de chômage temporaire ?

En cas de conditions météorologiques extrêmes de longue durée, l’employeur peut décider d’instaurer un régime de chômage temporaire.

Les conditions météorologiques doivent être de nature à rendre impossible l’exécution du travail. L’instauration d’un tel régime n’est pas autorisée lorsque la chaleur ne fait qu’entraver l’exécution du travail ou réduire la productivité. Quand il fait très chaud, il est par exemple permis d’instaurer du chômage temporaire si le béton ou la maçonnerie sèchent trop rapidement et si les matériaux ne peuvent pas être travaillés.

Il est évident que, dans ces cas,  les températures doivent être très élevées et persistantes. C’est l’ONEM qui donne la réponse finale à la question de savoir si les températures sont assez élevées pour empêcher l’exécution du travail.

Le travailleur peut-il mettre des vêtements d’été adaptés à son poste de travail ?

Les vêtements portés devront toujours être conformes au prescrit du règlement de travail.