Interruption de carrière, diminution de carrière, congé parental et autres congés thématiques : une meilleure protection du travailleur en cas de prise et en cas de licenciement !

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À compter du 10 novembre, l’employeur devra composer avec de nouvelles règles protégeant davantage le travailleur en interruption de carrière, qui a réduit ses prestations ou qui a pris un congé thématique. L’employeur devra également tenir compte de règles plus strictes s’il licencie un travailleur qui a pris un de ces congés.


Dans le cadre de la transposition dans la législation nationale de la Directive européenne du Parlement et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants, le législateur a pris une série de mesures pour protéger davantage les travailleurs en interruption de carrière, en congé thématique ou qui a réduit ses prestations. Ces mesures s’appliqueront à partir du 10 novembre 2022.

Passons-les en revue.

1. Le congé parental légal et occupation comme intérimaire

Pour bénéficier du congé parental légal, le travailleur doit avoir été lié par un contrat de travail avec l’employeur concerné durant douze mois dans les quinze qui précèdent la demande. Désormais, les périodes antérieures d’occupation comme intérimaire chez l’employeur (à ce moment utilisateur) sont prises en compte.

2. Prise du congé parental légal

Un travailleur ayant pris un congé parental sur la base de la CCT 64 du 29 avril 1997, conclue au sein du Conseil national du Travail, instituant un droit au congé parental, peut prendre un nouveau congé parental légal de deux mois à temps plein ou l’équivalent sous une autre forme pour le même enfant.

Moyennant l’accord de l’employeur :

  • le travailleur peut prendre 40 mois de congé parental dans une occupation à 9/10e d’un temps plein,
  • la totalité ou une partie de la période de quatre mois de congé parental à temps plein peut être prise par périodes d'une semaine ou d’un multiple d'une semaine,
  • la totalité ou une partie de la période de 8 mois de congé parental à temps partiel peut être prise par périodes d'un mois ou d’un multiple d'un mois.

Si l’employeur n’est pas d’accord avec ces formules, il doit communiquer sa décision par écrit au travailleur, décision qui doit dorénavant être motivée. L'absence de décision sera considérée comme un accord de l'employeur.

Le travailleur peut prendre le congé parental légal :

  • à l’occasion de la naissance de son enfant, jusqu’au douzième anniversaire de l’enfant,
  • Dans un contexte d'adoption, le travailleur a droit au congé parental pendant une période qui court à partir de l'inscription de l'enfant comme faisant partie de son ménage, au registre de la population ou au registre des étrangers de la commune où le travailleur a sa résidence, et au plus tard jusqu'à ce que l'enfant atteigne son douzième anniversaire.

La limite d'âge est fixée à 21 ans lorsque l'enfant est atteint d'une incapacité physique ou mentale de 66% ou d'une affection qui a pour conséquence qu'au moins 4 points sont reconnus dans le pilier I de l'échelle médico-sociale au sens de la réglementation des allocations familiales ou qu’au moins 9 points soient reconnus dans l’ensemble des trois piliers de cette échelle médico-sociale.

La condition du douzième ou du vingt-et-unième anniversaire doit être remplie au plus tard pendant la période du congé parental. Toutefois, la limite du douzième ou du vingt-et-unième anniversaire peut être dépassée si le congé est reporté à la demande de l'employeur et à condition que la notification écrite ait été faite selon les règles prévues. Il va désormais de même si le congé est reporté en raison d'une alternative proposée par l'employeur (voir ci-dessous).

La possibilité de l'employeur de différer le droit au congé parental est modifiée. 

Dans un délai d'un mois après que le travailleur l'a informé qu'il souhaite prendre un congé parental, l'employeur peut reporter par écrit l'exercice du droit au congé parental si la prise d'un congé parental pendant la période demandée perturberait gravement le bon fonctionnement de l'entreprise. Le document écrit doit reprendre une motivation complète du report.

Si le travailleur souhaite prendre 4 mois de congé parental, ou le fractionner en périodes d'une semaine ou d'un multiple de celle-ci de telle sorte que la partie restante est inférieure à 4 semaines, l'employeur, pour exercer son droit de report, doit proposer par écrit au travailleur une ou plusieurs alternatives à la prise du congé parental, consistant en une ou plusieurs autres formes de prise et/ou périodes situées totalement ou partiellement dans les dates de début et de fin demandées par le travailleur et autorisées dans le cadre du congé parental.

Le document écrit doit comprendre :

  • d'une part, soit la ou les formes proposées comme alternative et, pour chaque forme proposée, les dates de début et de fin de la ou des périodes proposées, soit les dates de début et de fin de la ou des périodes proposées comme alternative, et,
  • d'autre part, le délai dans lequel le travailleur peut accepter l'offre de l'employeur, qui ne peut être inférieur à une semaine.

Le droit dont dispose l'employeur de reporter le droit au congé parental n'empêche pas le congé parental de prendre effet au plus tard six mois après le mois au cours duquel le report motivé a lieu.

Si l'employeur exerce son droit de report, le travailleur a le droit de renoncer au droit de prendre le congé parental avant qu'il ne commence.

L'employeur ne peut pas appliquer un délai lorsque le travailleur :

  • souhaite prendre 40 mois de congé parental dans une occupation à 9/10e d’un temps plein;
  • souhaite prendre la période de quatre mois de congé parental à temps plein par périodes d'une semaine ou d'un multiple d'une semaine;
  • la totalité ou une partie de la période de 8 mois de congé parental à temps partiel souhaite prendre par périodes d'un mois ou d’un multiple d’un mois.

Le droit pour le travailleur de demander un aménagement de son régime de travail ou de son horaire de travail pour la période suivant la fin du congé parental est supprimé pour les travailleurs liés par un contrat de travail. Cette possibilité n’existe donc plus.

Ces nouveautés concerneront les demandes soumises à l'employeur à partir du 10 novembre 2022.

3. Prise d’un congé pour aider ou soigner un membre du ménage ou de la famille gravement malade

Moyennant le respect des règles de durée minimale en cas d’occupation à temps partiel et l’accord de l’employeur, le travailleur peut, dans le cadre d’un congé pour aider ou soigner un membre du ménage ou de la famille gravement malade, choisir de répartir ses prestations de travail réduites sur une période convenue. La période convenue ne doit pas durer au moins un mois ou un multiple d'un mois. Cette répartition est possible dans la mesure où la moyenne des heures de travail réduites correspond à la réduction de l'horaire normal d'un emploi à temps plein (1/5 ou ½) autorisée par la loi.

4. Protection contre le licenciement

Ce qui suit ne concerne pas le licenciement des travailleurs en crédit-temps réglé par la CCT n° 103 conclue au sein du Conseil national du travail. Cette CCT prévoit une protection contre le licenciement similaire.

L’employeur ne peut pas licencier le travailleur parce qu'il prend une interruption de carrière, réduit ses prestations ou prend un congé thématique. En outre, l’employeur devra désormais motiver le licenciement : le travailleur pourra demander à l’employeur de lui notifier par écrit les raisons de son licenciement.

La période de protection commence toujours à courir le jour de l'accord ou le jour de la demande dans les cas où le travailleur peut faire valoir un droit à l'interruption de carrière, à sa réduction ou à un congé thématique. Elle prendra fin trois mois après la fin de la suspension de l'exécution du contrat de travail ou de la réduction du temps de travail. Si la suspension de l'exécution du contrat de travail ou la réduction du temps de travail n'a pas commencé (refus ou retrait), cette interdiction prend fin un mois après la date de début demandée.

La nouveauté réside dans le fait que si l’employeur communique le licenciement au travailleur après la fin de la période de protection, mais que le travailleur peut prouver que le licenciement était déjà préparé d’une certaine manière durant cette période (par exemple, si la décision était déjà prise, mais pas encore communiquée, si des offres d’emploi ont été publiées ou s’il était prévu de remplacer définitivement le travailleur en raison de la prise du congé), le licenciement tombera sous la protection.

Si le licenciement est déclaré illégal, l’employeur devra verser au travailleur une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire brut, sans préjudice de l'indemnité due en cas de résiliation du contrat de travail. Cette indemnité ne peut toutefois pas être cumulée avec d'autres indemnités de protection.

5. Entrée en vigueur

Ces mesures entreront en vigueur le 10e jour après leur publication au Moniteur belge, soit le 10 novembre 2022.

Sources :

  • Loi du 7 octobre 2022 transposant partiellement la Directive (UE) 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants et abrogeant la directive 2010/18/UE du Conseil, et réglementant certains autres aspects relatifs aux congés (Moniteur belge du 31 octobre 2022) ;
  • Arrêté royal du 7 octobre 2022 transposant partiellement la Directive (UE) 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants et abrogeant la directive 2010/18/UE du Conseil (Moniteur belge du 31 octobre 2022).