Chômeur avec complément d’entreprise et disponibilité : on y est !

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Les différentes mesures concernant la disponibilité sur le marché de l’emploi des chômeurs avec complément d’entreprise sont à présent officielles.

Suite à l’accord de gouvernement intervenu fin 2014, il était prévu que les chômeurs avec complément d'entreprise perdent leur statut avantageux à partir du 1er janvier 2015. Grâce à ce statut, ils pouvaient bénéficier des allocations de chômage jusqu'à leur pension sans devoir respecter aucune obligation.

Vu les différentes réactions que cette mesure a engendrées, les partenaires sociaux ont demandé au gouvernement de faire marche arrière. Ce dernier a entendu l’appel et accepté d’amender, en partie, la mesure. Les différents arrêtés royaux ont tous été publiés au Moniteur belge, ce qui nous donne l’occasion de faire le point.

Les mesures concernent à la fois les chômeurs avec complément d’entreprise qui sont déjà dans le système (« stock ») et les nouveaux arrivants.

1. Disponibilité initialement prévue

Tout bénéficiaire du RCC devait, en principe, depuis le 1er janvier 2015 être disponible de manière passive et active jusqu'à l'âge de 65 ans, et ce quel que soit son âge ou son passé professionnel et quel que soit le régime sur la base duquel il partait en RCC.

Ceci valait de manière générale et également si, en tant que bénéficiaire du RCC, il ne devait, avant 2015, pas être disponible.

Cela signifiait notamment qu’il était à nouveau inscrit comme demandeur d'emploi et que l'organisme régional pour le placement et la formation professionnelle pouvait le convoquer.

2. Mesures transitoires pour les chômeurs avec complément d’entreprise en cours (« stock »)

Les chômeurs avec complément d’entreprise « en cours » continuent d’être dispensés de disponibilité sur le marché de l’emploi. Ils doivent cependant remplir l’une de ces conditions :

  • avoir été licenciés avant le 1er janvier 2015 ;
  • avoir demandé, avant le 1er janvier 2015, pour la première fois, des allocations de chômage avec complément d’entreprise ;
  • avoir été licenciés avant ou après le 1er janvier 2015 et être devenu chômeur avec complément d’entreprise dans le cadre d’une reconnaissance de leur entreprise en difficulté ou en restructuration à condition :
  1. que la date de début de la période de reconnaissance (dans la majorité des cas ce sera la date d’annonce du licenciement collectif) est située avant le 9 octobre 2014 ;
  2. et qu’à la fin de la période couverte par l’indemnité de rupture ou à la fin de la période du délai de préavis (sans tenir compte des éventuelles prolongations de ce préavis), ils puissent justifier de 38 ans de passé professionnel ou sont âgés d’au moins 58 ans.

Concernant cette troisième catégorie, s’ils ne remplissent pas les conditions précitées (âge ou ancienneté), ils peuvent néanmoins demander la dispense plus tard si soit ils prouvent 38 ans de passé professionnel et au moins 312 allocations comme chômeur complet au cours des deux années qui précèdent la date de la demande soit ils atteignent 60 ans (conditions autrefois applicables pour la maxi-dispense).

Cette demande de dispense s’effectue au moyen du formulaire C89, à introduire auprès de l’organisme de paiement.

3. Nouveaux chômeurs avec complément d’entreprise (« nouveaux arrivants »)

Concernant les nouveaux chômeurs avec complément d’entreprise (« nouveaux arrivants »), des adaptations ont été prises. Ils ne sont pas dispensés de disponibilité mais sont soumis à une disponibilité adaptée.

3.1. Notion de disponibilité adaptée

Cette notion est nouvelle et est introduite dans la réglementation relative au chômage.

Elle signifie, notamment, que le chômeur n’est pas tenu de rechercher activement un emploi. Par contre, il doit :

  • être et rester inscrit comme demandeur d’emploi et fournir la preuve de cette inscription ;
  • et collaborer à un accompagnement personnel adapté qui s’effectuera conformément à un plan d’action individuel.

Les chômeurs avec complément d’entreprise doivent être disponibles de façon adaptée jusqu’au mois au cours duquel ils atteignent l’âge de 65 ans.

En cas de non-respect de ce qui précède (inscription et/ou participation au plan d’accompagnement), le chômeur avec complément d’entreprise risque un avertissement ou l’exclusion du droit aux allocations de chômage. Dans ce dernier cas, il perdra également le droit au complément d’entreprise puisque celui-ci est intrinsèquement lié au bénéfice des allocations de chômage (le complément sera à nouveau exigible dès le moment où le chômeur bénéficiera à nouveau des allocations).

3.2. Possibilités de demander une dispense

Sous certaines conditions, le chômeur avec complément d’entreprise peut cependant demander à être dispensé de l’obligation de disponibilité adaptée.

Cette demande de dispense doit parvenir au bureau de chômage préalablement ou dans un délai de deux mois prenant cours le jour suivant le premier jour pour lequel les allocations sont demandées si le chômeur introduit la demande à l’occasion d’une demande d’allocations. Le chômeur qui a bénéficié d’une dispense car il remplissait les conditions peut en bénéficier à nouveau après une interruption de la période chômage indemnisée.

Les chômeurs avec complément d’entreprise qui bénéficient des RCC qui suivent peuvent demander une dispense de disponibilité adaptée.

1°. RCC sur base de la CCT n° 17

Il faut cependant avoir 42 ans de passé professionnel.

2°. RCC régime général 62 ans

Il s’agit des CCT conclues pour la 1ère fois après le 31 décembre 2011.

Il faut cependant avoir 43 ans de passé professionnel.

3°. RCC pour travailleurs moins valides ou ayant des problèmes physiques grave

4°. RCC travail de nuit, inaptitude secteur de la construction, métier lourd, très longue carrière

Pour la période 2015-2016, il faut avoir atteint l’âge de 60 ans ou avoir 40 ans de passé professionnel.

À partir de 2017, les conditions sont portées à 62 ans ou 42 ans de passé professionnel.

Comme déjà expliqué dans notre article du 13 mai 2015, les partenaires sociaux ont la possibilité, pour la période 2017-2018, via la conclusion d’une convention collective de travail nationale et sectorielle (conclue en application de la CCT nationale) de « freiner » l’augmentation de l’âge à partir de 2017 (passage à 60 ans en principe). Si ces différentes conventions sont conclues, l’âge d’accès de ces différents régimes pourrait être maintenu à 58 ans. Pour tenir compte de cet âge du RCC qui sera prévu par les partenaires sociaux dans les CCT pour la période 2017-2018, l’âge de la disponibilité adaptée pourra être revu par un arrêté royal prévu en Conseil des Ministres, après avis unanime du Conseil national du travail rendu avant le 31 décembre 2016.

5°. RCC dans le cadre d’entreprises reconnues en restructuration ou en difficultés, en ce compris les entreprises dont la date du début de la reconnaissance est située dans la période du 9 octobre 2014 au 31 décembre 2014

Pour la période 2015-2016, il faut avoir atteint l’âge de 60 ans ou avoir 38 ans de passé professionnel.

Pour 2020, les conditions sont portées à 65 ans ou 43 ans de passé professionnel.

Cela veut dire que la convention collective de travail qui sera conclue après 2016 par le Conseil national du travail doit prévoir un calendrier pour fixer finalement au 31 décembre 2019 l’âge à 65 ans et le passé professionnel à 43 ans.

Remarque : pour les entreprises dont la date de début de la reconnaissance se situe à partir du 1er janvier 2015, il est impératif que la convention ou l’accord collectif mentionne explicitement qu’ils sont conclus en vertu de la convention collective nationale (actuellement la CCT n° 117).

3.3. Tableau récapitulatif

Type de RCC Quelle disponibilité ? Exception possible ?
Bénéficiaire du RCC au 01.01.2015 ou licencié avant le 01.01.2015 Aucune Dispense automatique
RCC régime normal (60 ou 62 ans) Disponibilité adaptée jusque 65 ans Oui1 si 42 ou 43 ans de passé professionnel
RCC travailleurs moins valides ou avec problèmes physiques graves Disponibilité adaptée jusque 65 ans Oui1
RCC travail de nuit, inaptitude construction, métier lourd ou très longue carrière Disponibilité adaptée jusque 65 ans

Oui:

- 2015-2016 : si 60 ans ou 40 ans de carrière ;

- àpd de 2017 : si 62 ans ou 42 ans de carrière (sauf si CCT-cadre)

RCC entreprise en difficulté ou en restructuration Début reconnaissance avant 09/10/2014 Aucune si 58 ans ou 38 ans de carrière Dispense automatique (sauf si conditions pas remplies => demande de dispense possible àpd de 60 ans = maxi-dispense)
Début reconnaissance entre 09/10/2014 et 31/12/2014 Disponibilité adaptée jusque 65 ans Oui1 si 60 ans ou 38 de carrière + CCT-cadre du CNT (n° 117)
Début reconnaissance àpd 01/01/2015 Disponibilité adaptée jusque 65 ans Oui1 si 60 ans ou 38 de carrière + CCT-cadre du CNT (n° 117) + mention dans la CCT ou l'accord collectif (2015-2016)

1 la dispense doit être demandée !

4. Outplacement

Pour savoir si une offre d’outplacement doit être faite à un travailleur licencié dans le cadre du régime de chômage avec complément d'entreprise, il faut déterminer dans quel régime on se situe.

S’il s’agit du régime général (travailleurs dont le contrat de travail est rompu par l'employeur moyennant un délai de préavis de minimum 30 semaines ou une indemnité compensatoire de préavis correspondante), l’offre d’outplacement (ou de reclassement professionnel) est obligatoire.

S’il s’agit du régime spécifique (45 ans et plus ayant 1 an d’ancienneté au moins et dont le préavis est inférieur à 30 semaines), ce n'est pas le cas.

Dans ce régime spécifique, il est prévu que l’employeur n’est pas tenu d’offrir une procédure de reclassement professionnel à certaines catégories de travailleurs, sauf lorsque ceux-ci lui en font explicitement la demande. Sont notamment concernés les travailleurs qui sont dans une situation telle que s’ils devenaient chômeurs complets indemnisés à l’issue du délai de préavis ou de la période couverte par une indemnité de congé, ils ne devraient pas être disponibles pour le marché général de l’emploi .

Ne doivent notamment pas être disponibles sur le marché de l’emploi, dans le cadre de l’outplacement (= arrêté royal du 21 octobre 2007) :

  • les ex-travailleurs devenus chômeurs avec complément d’entreprise dans un régime général ou dérogatoire ;
  • les ex-travailleurs devenus chômeurs avec complément d’entreprise dans le cadre d’une reconnaissance de leur entreprise en difficulté ou en restructuration et qui à la fin de la période couverte par leur indemnité de rupture ou à la fin de la période de leur délai de préavis (sans tenir compte des éventuelles prolongations de ce préavis), peuvent justifier de 38 ans de passé professionnel ou sont âgés d’au moins 58 ans.

Les changements que nous avons cités ci-avant n’ont aucun impact sur l’outplacement puisque la source légale est différente. Il avait cependant été question de modifier l’arrêté royal du 21 octobre 2007 et de supprimer cette différence existante entre les régimes d’outplacement. Mais l’arrêté n’a pas encore été publié. Par conséquent, légalement, si les conditions sont remplies, l’employeur ne doit pas faire spontanément d’offre de reclassement professionnel.

Cependant, maintenant que toute la lumière est faite sur la disponibilité en matière de chômage concernant les chômeurs avec complément d’entreprise, nous pouvons nous attendre à ce qu’il en soit de même concernant l’outplacement dans le cadre du régime spécifique. A suivre…

5. Sources

Arrêté royal du 1er juin 2015 modifiant l’article 89 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage et insérant un article 89/1 dans le même arrêté royal, M.B., 10 juin 2015.

Arrêté royal du 1er juin 2015 modifiant l’arrêté royal du 30 décembre 2014 modifiant l’arrêté royal du 3 mai 2007 fixant le régime de chômage avec complément d’entreprise, M.B., 11 juin 2015.

Arrêté royal du 19 juin 2015 modifiant l’arrêté royal du 3 mai 2007 fixant le régime de chômage avec complément d’entreprise, M.B., 3 juillet 2015.

Arrêté royal du 19 juin 2015 modifiant les articles 56 et 89 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, M.B., 3 juillet 2015.